mercredi 1 juillet 2009

Jusqu'à Salvador, ... Itaparica

Nous sommes à Itaparica, un petit village tranquile au bord de la mer, en face de Salvador, la grosse ville où nous ne sommes passés qu'une journée avant de prendre la fuite. C'est notre déstination finale après un peu plus de 24,000km dans les mollets. Cela nous laisse quelques jours pour nous détendre, écrire, nous empifrer de mangues (un gros manguier en balance plein dans le jardin de la maison où nous louons une chambre). Pas de nostalgie, juste une nouvelle aventure sur le point de commencer, le retour en Europe!


Nous sommes sortis de Minas Gerais et d'une topographie très accidentée en redescendant vers la côte, d'abord en traversant Espiritu Santo et puis Bahia. Ces états sont nettement plus anarchiques mais tellement plus animés, nous avions l'impression d'aller vers le meilleur du Brésil. D'énormes massifs granitiques faisaient désormais partie du décors, comme des crocs géants s'élançant quasiment à la verticale depuis les pâturages. Sur les sommets innaccessibles, des touffes de forêt vierge narguaient les collines jaunies.

Pas mal de BR-101 avant de pouvoir longer la côte à proprement parler depuis Porto Seguro. Dans toutes ses courbes, la route porte des traces d'accidents, l'asphalte se plisse, s'éclabousse de cicatrices.
L'épaule défoncée est parsemée de débris, pare-chocs, pare-brise, pneus éclatés, morceaux de carrosserie incrustés dans les talus, rien ne manque pour nous rappeler combien la vie est fragile sur cette route. Nous assistons ébahis et tendus aux dépassements les plus intrépides, entre camions, bus et grosse cylindrées, sur double ligne continue, en sommet de côte ou dans les virages. Peu importe la visibilité, dieu est le seul garde-fou pour ces conducteurs suicidaires. Nous espérons juste ne jamais être sur leur trajectoire lorsque ces derniers s'envoient dans le décors.
Enfin entre Porto Seguro et Belmonte, nous avons retrouvé du plat sur des routes de campagne très solitaires, bordées de cocotiers, de palmiers à huile et de plantations de cacaoyers. Les locaux sèchent les fèves de cacao à même la route devant leurs cases en terre. La route côtière s'interrompe à Belmonte, une petite ville de pêcheurs oubliée au début du 20em siècle. Dans un kiosk informel, sur la rive Sud du Jequitinhonha, entre cocos vertes et grappes de crabes récemment sortis de l'eau, nous négocions un passage vers Canavieiras.

Nos vélos enchevêtrés à l'avant d'une barcasse rustique, deux autres passagers sur la banquette arrière et un pêcheur au manche du hors-bord, nous glissons dans une mangrove labyrhintique. Sur des eaux très boueuses mais sans une ride, nous suivons des berges envahies de palétuviers. C'est le royaume des crabes rouges, furtifs entre les racines, et des hérons blancs à l'affut du crustacé et de sa chair fine. Deux heures coulent dans cet univers hors du monde habitable. Dans ce dédale de canaux vaseux, nous ne croisons que quelques pirogues en route vers des communautés retirées. Et puis l'horizon s'ouvre sur l'embouchure du Rio Pardo pour y accompagner le coucher du soleil.

A vol d'oiseau, seulement une vingtaine de kilomètres nous séparaient de Canavieiras où reprend la route asphaltée depuis peu. Mais cette excursion et l'arrivée sur un ponton désolé de la ville coloniale nous donnèrent l'illusion d'avoir voyagé dans le temps.
Chaque village nous enchante, l'ambiance tranquile et bordélique à la fois nous remet dans l'atmosphère des petites patelins de Colombie et de Cuba. Tous y est facile, les gens nous saluent presque en liesse au passage (brandissant leurs machettes à l'occasion, ok, on se calme!). Il faut dire que ça les étonne toujours que nous ayons pédalé plus de 5000km depuis le Sud du Brésil pour passer par leur village. De leur point de vue, c'est comme si tous nos efforts convergeaient vers cette visite très spéciale et inhabituelle.

Depuis Itacaré, une traversée en barge et 13km de piste détrempée (sous une averse tropicale bien soutenue) entre plantations d'arbres à caoutchouc, nous permettaient de rejoindre une route toute neuve, la BA-001 encore non-reliée au Sud (il n'y avait pas de pont).

Nous avons eu beaucoup de pluie lors de nos dernières pédalades, mais comme la température ne descendait pas en dessous de 25 degrés et qu'il n'y avait aucune circulation de toutes façons, nous ne nous donnions pas la peine de nous mettre à l'abri. Nous finissons toujours par sècher dans les heures qui suivent, aussi rincés que nous puissions être.

Plus de Photos, plus de route